Le Congo belge et son nouveau destin

 
Juillet 1959, page 14
Le Congo belge et son nouveau destin

Une puissance économique au cœur du continent africain

 

Dès 1890 les gisements cuprifères du Katanga, aujourd’hui connus dans le monde entier, suscitèrent un extraordinaire enthousiasme, notamment en Afrique du Sud. Les grandes sociétés surent immédiatement prendre les mesures nécessaires pour organiser une exploitation rationnelle.

Le cuivre du Katanga est situé à faible profondeur. Il recèle des teneurs supérieures à celles des meilleurs gisements d’Amérique du Nord. Il a fait, dès les dernières années du dix-neuvième siècle, la fortune de l’Union minière du Haut-Katanga et celle du Congo belge.

Sur ces gisements de cuivre est concentré le seul ensemble industriel important d’Afrique centrale. Plus de 20 000 ouvriers africains travaillent dans les fonderies d’Elisabethville et de Jadotville, commandées par 2 000 Européens, et livrent chaque année aux usines européennes près d’un dixième du cuivre-métal raffiné dans le monde.

Les Belges exploitent également l’or, l’étain, le zinc, le plomb. Actuellement, la capacité locale de production est de 50 000 tonnes de zinc électrolytique par an. La production de cadmium et de germanium est en progrès constant, par contre celle d’uranium a été réduite. En effet le principal gisement de ce métal — celui de Shinkolobwe — est en voie d’épuisement.

Le Congo belge est le premier producteur mondial de diamant, et malgré la menace des produits synthétiques russes et américains les exportations de diamants sont en plein essor.

Les bénéfices réalisés par les compagnies minières ont permis de développer les voies de communication et le commerce. Le réseau routier reste peu développé, mais la navigation est remarquablement organisée. Le Congo, l’Oubangui et leurs affluents ont été soigneusement balisés. D’autre part une flottille abondante et spécialisée a été dotée de tous les perfectionnements de la technique moderne, y compris le radar.

Elisabethville constitue un nœud ferroviaire aussi bien relié à l’océan Indien qu’à l’océan Atlantique. Quant à Léopoldville et Stanleyville, il s’agit des plaques tournantes du réseau aérien.

C’est également la richesse des compagnies minières qui a permis un développement prodigieux de l’agriculture, et le gouvernement belge a fondé de grands espoirs sur la colonisation agricole européenne.

Tous les types de petites, moyennes et grandes plantations existent au Congo : caféières, cacaoyères, bananeraies, palmeraies, plantations d’hévéas. Exploitées tantôt par des particuliers, tantôt par de grosses sociétés anonymes, elles voisinent avec les cultures itinérantes pratiquées sur brûlis par les Africains.

De plus en plus les Belges aménagent les palmeraies naturelles à proximité desquelles ils montent de petites usines pour l’extraction de l’huile. Le Congo est actuellement le deuxième producteur mondial d’huile de palme après la Nigeria avec un tonnage représentant environ 20 % de la production mondiale.

Exporté surtout à destination des Etats-Unis, le café représente 10 % de la valeur totale des marchandises vendues à l’étranger.

Depuis la deuxième guerre mondiale l’hévéaculture se développe chez les Africains eux-mêmes, mais la principale source de revenus monétaires des indigènes reste le coton. Il représente en valeur environ 25 % des produits végétaux livrés au commerce par les Africains.

Les exportations minières atteignent actuellement 50 % du commerce extérieur congolais. Depuis dix ans l’exportation des bananes a décuplé, celles de l’huile, du coton et du caoutchouc ont quintuplé. Le volume des exportations d’huile de palmistes et de tourteaux a triplé, celui du bois et du cacao doublé.

En 1958 la plupart des productions agricoles ont dépassé le niveau de l’année précédente. Les progrès furent particulièrement sensibles en ce qui concerne les oléagineux, le coton, le café, le thé, le sucre. Le caoutchouc et le cacao ont atteint des tonnages sensiblement égaux à ceux de l’exercice précédent.

Les investissements consentis tant au bénéfice de la recherche scientifique appliquée qu’à celui de l’équipement agricole et industriel ont assuré aux exploitations congolaises des conditions techniques de production qui se comparent favorablement à celles des autres pays avec lesquels le Congo est en concurrence.

La mise en place des méthodes culturales nouvelles, par l’application d’engrais notamment, la concentration d’importantes sociétés de plantation parallèlement à l’essor des coopératives indigènes, tendent à établir lentement un certain équilibre entre productions agricoles et minières.

De 1950 à 1956 le produit national brut du Congo est passé de 37 milliards 700 millions de francs à 61 milliards 150 millions de francs belges. Dans ce revenu la part de la communauté africaine est passée en six ans de 46 à 54 %. Dans le même laps de temps le volume global des salaires des Africains est passé de 5 milliards 180 millions à 13 milliards 150 millions, dont les trois quarts environ sont payés par des entreprises privées.

L’expansion suscitée par l’apport de capitaux pendant la période 1950-1956 a eu une incidence directe et importante sur le standing des masses. Certes ce mouvement a été freiné par la récession mondiale, mais une grande partie de la population locale est passée de l’économie de subsistance à l’économie d’échanges. D’autre part, après avoir atteint 1 million de tonnes en 1950 le volume des exportations congolaises a plus que doublé en 1958.

A Léopoldville, où existe pourtant une offre excédentaire de logements, l’industrie de la construction et du bâtiment est en expansion.

Le Congo belge produit déjà depuis plusieurs années des tissus, des chaussures, du ciment, de la bière, des cigarettes, des conserves alimentaires. De nouvelles industries sont en cours d’installation et d’autres font l’objet de réorganisations profondes ou de fusion.

Les besoins de l’industrie locale en main-d’œuvre ont déterminé un certain déracinement des Africains qui ont émigré dans les agglomérations urbaines où 90 % d’entre eux travaillent dans des entreprises européennes. Cependant les autorités belges ont tout mis en œuvre pour redonner un nouveau cadre destiné à remplacer les coutumes à ceux qui ont quitté leur pays d’origine. Ce souci honore le gouvernement belge, qui peut également s’enorgueillir d’avoir installé la première université d’Afrique centrale à Kimuenza, près de Léopoldville.

Grâce aux efforts déployés par la Belgique, un vaste pays aux conditions naturelles rappelant celles du bassin de l’Amazone s’est éveillé à la vie moderne. Ouvert cependant trois siècles plus tard que la forêt amazonienne à la civilisation occidentale, le Congo belge constitue aujourd’hui le meilleur exemple de réussite économique de la colonisation européenne en Afrique centrale. Grâce aux gigantesques moyens techniques et financiers mis en œuvre, le Congo peut valablement prétendre au rang de puissance économique mondiale.

Information sur le Congo belge établie sur la base de documents fournis par le ministère du Congo belge et du Ruanda-Urundi.