Commandos katangais

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Opération Kabambare

Dès l’arrivée du 9e Bn commando, le major PROTIN fit installer des supports de mitrailleuses sur les jeeps par un garagiste italien d’Albertville et il rassembla toutes les troupes disponibles pour contre attaquer les rebelles de la région de Fizi-Kabambare. La colonne « Papa » se composait du 9e Bn commando katangais, confié au capitaine VERVAECKE, des 87 survivants du 2e commando katangais, de trois compagnies du 8e Bn d’infanterie ANC et de la centaine de Congolais du 4e commando ANC du major UTSHIDI. Ils ignoraient qu’un chargement d’armes chinoises était parvenu aux maquis rebelles du Sud Maniéma. Le village de Kabambare était défendu par un bataillon de l’APL commandé par le maj Augustin LUBENGA, Lubondja, situé 50 km de Fizi, était défendu par un bataillon renforcé de l’APL commandé par le maj André OMARI et le port de Baraka était défendu par un bataillon de 540 hommes commandé par le col WASOSHI et le ltcol Abedi KABWE formé en Chine Populaire. La colonne « Papa » se mit en route le 13 novembre vers Lulimba laissant Albertville à la garde du 14e bataillon d’infanterie ANC du major MBADU. Le carrefour Lulimba-Kabambare-Fizi fut réoccupé le 15 novembre avec l’appui des T-28D du WIGMO et laissé à la garde d’une compagnie du 8e Bn d’infanterie ANC de qualité médiocre. Le 17 novembre, le village de Kabambare fut occupé, mais Marcel HENDRICKX fut tué. Cette petite localité se composait du bâtiment du territoire, d’une ancienne station radio, de la mission catholique des révérends Pères Blanc et d’un centre commercial. Tout était à l’abandon après avoir été pillé et la population avait disparu. Des patrouilles explorèrent les villages des alentours, tandis que des chefs de village du Sud Maniéma se mettaient sous la protection de l’ANC. La colonne du major PROTIN s’empara d’une Land Rover, de quatre camions, d’un véhicule VW et d’armes diverses, dont des vieux Mauser, deux FAL, deux mortiers, une mitrailleuse .30 et douze fusils Simonov tout neufs. La colonne « Papa » repoussa une attaque des rebelles du major Augustin LUBENGA et le 18 novembre, le 9e Bn commando katangais effectua une patrouille vers Mazomeno. Cet important nœud routier, situé à 69 kilomètres de Kongolo, ne fut pas occupé par les commandos katangais de la colonne « Papa » qui retournèrent à Kabambare.

Le major PROTIN voulait poursuivre sa route vers Fizi car il avait reçu pour mission de tenir les Simba en haleine afin de préserver la ligne de communication de la 5e Brigade et le QG de Baka ordonna au 10e Bn commando katangais de rejoindre Kabambare pour y relever la colonne « Papa ». Après avoir balayé deux petites embuscades, les Léopards traversèrent lentement Mazomeno et empruntèrent l’axe routier menant vers Kabambare. La région était assez accidentée et la route traversait une forêt légère. Le major SCHRAMME poursuivit sa progression vers l’est sans grande hâte car l’animosité qui séparait les deux officiers belges ne s’était pas calmée. A ce moment, le major PROTIN redisposa ses forces avant de partir à l’attaque de Fizi et il voulut amener à Kabambare la compagnie ANC laissée à Lulimba pour qu'elle attende sur place l'arrivée du 10e Bn commando katangais. Kabambare fut laissée à la garde des commandos katangais de la colonne « Papa » et le 20 novembre, la compagnie du 8e Bn ANC composée de bons soldats se mit en route, escortée par trois mercenaires et un peloton du 9e commando. Le détachement fut surpris par des rebelles bien armés et très combatifs lors d’une halte dans le village de Pene Lunanga, près de Pene Mende. Cette localité située à 86 km à l’est de Kabambare, abritait une importante base des Simba. Une trentaine de soldats noirs fut tuée, ainsi que les mercenaires Paul GARINOS et Edouard LAMBRETTE. Plusieurs hommes furent touchés, dont le major PROTIN qui fut gravement atteint. Abandonnant des armes et des véhicules, les rescapés retournèrent à Kabambare avec les blessés, précédés du major UTSHIDI qui s’était emparé de la jeep du major PROTIN. Les commandos katangais, ceux de l’ANC et les survivants du 8e Bn d’infanterie ANC, se retranchèrent dans Kabambare et le Quartier Général de la 5e Brigade à Baka fut alerté par radio.

Les T-28D du WIGMO ne pouvaient intervenir car au même moment, ils assuraient la couverture aérienne de la colonne « Lima 1 » de la 5e Brigade Mécanisée en route vers Punia, précédée par le peloton blindé du lt BERO. L’Ommegang au complet se dirigeait vers Stanleyville et Kindu avait été laissée à la garde du 21e Bn d’infanterie ANC du major FALLU et d’un détachement du 7e bataillon Commando Katangais du cpn MICHALSKY, renforcé par deux mercenaires. Pour empêcher les Simba d’exploiter leur succès en s’emparant d’Albertville, la 5e Brigade mit en alerte le 13e Bn commando Katangais du major GILMANT, une des unités du régiment du col TSHIPOLA en cours de formation à Baka. Le 21 novembre, il fut envoyé par avion à Albertville pour renforcer la garnison du major MBADU, tandis qu’une autoblindée M-8 Greyhound y parvenait par chemin de fer. Les blessés de la colonne « Papa » furent évacués vers Kongolo par l’hélicoptère de la Fatac venu de Kindu, mais le Douglas C-47 qui les attendait à Kongolo rata son décollage et il fallut envoyer un second bimoteur. Le QG de Baka chercha à contacter le major SCHRAMME pour lui ordonner d’accélérer la progression, mais son poste radio était fort opportunément en panne (le schéma du réseau radio était ainsi constitué : 5e Brigade/Baka – Ops Albertville – Kabambare (colonne Papa) – Kongolo – Samba – 10 codo). Le message fut transmis au PC du major de HUCCORNE à Kongolo et c’est par un indigène envoyé à bicyclette que le chef du 10e Bn commando Katangais reçut le message de la QG de la 5e Brigade lui ordonnant de porter secours à la colonne « Papa ».

Les parachutistes belges sautèrent sur Stanleyville le 24 novembre à l’aube et ils furent rejoint vers 10h00 du matin par les colonnes Lima 1 et Lima 2 de la 5e Brigade qui procédèrent à l’occupation de la ville. Par représailles, de nombreux otages européens furent massacrés par les rebelles, dont de nombreux missionnaires. A Baraka, les pères Giuseppe CARRARA et Vittorio FACCIN furent assassinés par le col Abedi KABWE, chef des opérations du secteur (Abedi KABWE eut des ennuis en janvier 1965 parce qu’il avait abattu un jeune simba. Il passa en conseil de guerre et dévoila au chef d’EM Lambert SELEMANI plusieurs méfaits commis par ses collègues de l’APL, dont la mort d’un nationaliste tué à Kindu par le ltcol NDUNIA, le vol d’objets appartenant aux pères missionnaires et aux Arabes de Fizi, le détournement de 25.000.000 de francs congolais reçus de Stanleyville quelques mois auparavant pour payer la solde, la disparition de 350 vélos confisqués aux ennemis du peuple PNP. Il adressait une copie de sa supplique au ministre de la défense SOUMIALOT, à Laurent-Désiré KABILA, à Idelphonse MASENGO, au commandant en chef de l’Armée Populaire de Libération, le lieutenant général OLENGA, au général Mahulana SHABANI et à d’autres responsables du Front de l’Est. Les corps des deux pères missionnaires furent retrouvés en janvier 1966). Le 26 novembre 1964 à Kindu, le gouverneur du Maniéma TSHOMBA-FARIALA appela au secours les autorités de Léopoldville car il craignait une attaque des rebelles sur la ville. Il demandait d’urgence des policiers, trente mercenaires et des véhicules. Le commandant du bataillon ANC et le cpn MICHALSKY appuyaient son appel à l’aide. Les Katangais du 7e bataillon Commando, qui avaient participé à l’occupation de Stanleyville par la 5e Brigade, furent renvoyés à Kindu début décembre et le ltcol BANGALA fut chargé de défendre Kindu et les localités d’alentour avec une section de mercenaires, le 3e bataillon Commando ANC, le 7e Bn commando katangais regroupé et le 21e Bn d’infanterie ANC. Pendant ce temps, les 11e, 12e, et 14e bataillon commando katangais du régiment Baka étaient transportés par la voie aérienne à Stanleyville et cantonné au camp Ketele. Le col TSHIPOLA qui le commandait était assisté par le major MWAMBU et conseillé par le major SAINT de l’Assistance Technique Militaire Belge. Chaque bataillon était encadré de mercenaires détachés du 6e bataillon commando européen. Peu après son arrivée à Stanleyville avec le peloton du lt BERO, le lt François LATINIS demanda sa mutation pour le 10e Bn commando Katangais. Il rejoignit son ancienne unité à l’occasion d’un convoi de ravitaillement.


Le commandant de la place de Kongolo

Le major de HUCCORNE, commandant la place de Kongolo, ne manquait pas de courage et les Simba ne lui faisaient pas peur, mais il réclamait des armes, des munitions, des véhicules et un renfort de mercenaires. Selon les instructions reçues du QG de la 5e Brigade, il devait défendre la région de Kongolo, assurer l’acheminement du ravitaillement par chemin de fer en provenance de Baka vers Kindu et Albertville, via Kabalo, et appuyer logistiquement le 10e Bn commando en route vers Kabambare, mais la liaison radio était coupée et il n’avait plus de nouvelle de sa progression. Selon Jean SCHRAMME, l’avance de son bataillon fut longue et difficile car il dut subir plusieurs embuscades durant les septante quatre kilomètres qui séparent Mazomeno de Kabambare. Les camions du 10e Bn commando étaient lourdement chargés car il fallait emporter les munitions, les vivres et le carburant pour plusieurs jours d’opérations. Deux de ses pelotons marchaient en avant-garde et des éclaireurs progressaient dans la brousse parallèlement à la colonne car des Simba s’y camouflaient en embuscade. Deux pelotons protégeaient le charroi et deux autres formaient l’arrière-garde. En cas d’alerte, deux sections par pelotons se mettaient en formation de tirailleurs et les autres protégeaient les flancs de la colonne. Quelques jours plus tard, il balaya une nouvelle embuscade et ses Léopards atteignirent la petite localité de Lubao à 26 kilomètres de Mazomeno. Ils fouillèrent les cases, mais le village était vide d’habitants. A chaque bivouac, le bataillon se mettait en défensive et Jean SCHRAMME rassemblait ses chefs de peloton, tandis que des sentinelles montaient la garde à tour de rôle. Le lendemain, le commando « Kansimba » traversa le pont sur la Luaya que les Simba avaient tenté de saboter durant la nuit, mais deux embuscades les attendaient un peu plus loin. Ils furent bombardés au mortier sans subir de pertes car les tirs des rebelles manquaient de précision. Jean SCHRAMME ordonna à François LATINIS de mettre trois tubes de 81 mm en action et une trentaine d’obus mirent les maquisards en fuite vers Kaniki. Le jour suivant, les Léopards n’étaient plus qu’à 17 kilomètres de leur but, mais une nouvelle embuscade les attendait au carrefour de Kaniki. Les Simba qui s’opposaient à leur progression furent repoussés et la jonction avec la colonne du major PROTIN eut lieu le 12 décembre vers 13h00.

Avant de commencer l’évacuation des rescapés, le major SCHRAMME installa son bataillon dans l’ancienne école de la mission et deux de ses pelotons s’assurèrent de la défense de l’agglomération. Le poste radio fut « réparé » et une liaison fut établie avec le QG de la 5e Brigade, via Kongolo. Il prétexta que de nombreuses embuscades avaient ralenti sa progression et il demanda de renforcer son bataillon avec des Katangais du 9e Bn commando qui en avaient exprimé le désir, mais cela fut refusé. Il annonça également qu’il avait l’intention d’abandonner Kabambare. Le QG de la 5e Brigade lui intima l’ordre de se maintenir à tous prix dans la localité et il fut menacé d’une attaque par bombardiers B-26K s’il refusait de demeurer sur place. A leur arrivée à Kongolo par convoi routier, les rescapés du 9e Bn commando furent mis au repos, puis ils retournèrent à Albertville pour renforcer la garnison. A Kabambare, le major SCHRAMME s’accapara d’une partie du charroi de la colonne « Papa » pour les besoins de sa mission, ce qui lui valut une réputation de « voleurs de véhicule ». Le bataillon Léopard s’installa en défensive avec bunkers et tours de guet et un convoi de ravitaillement le relia une fois par mois à Kongolo. Début décembre, il reçut l’ordre de progresser vers Fizi et il atteignit le pont Bailey sur la Luama. Une de ses patrouilles avança jusqu’à Pene Lunanga sans rencontrer de résistance. Pour assurer la sécurité de Kabambare, le 1er peloton de la 2e compagnie (A2) commandée par l’adjudant Pierre fut chargé d’installer un avant-poste à Kimano, à 36 km à l’est de la position principale.

Le major SCHRAMME résista quatre mois dans la région de Kabambare avant d’évacuer son bataillon vers Kongolo le 5 mars 1965 à 6 heures du matin, prétextant qu’il manquait de carburant et de munitions malgré ses nombreux appels radios à Kongolo. Le charroi du 10e Bn commando s’était renforcé et se composait de trois jeeps armées de mitrailleuses, d’une camionnette et de dix camions. Craignant une attaque ennemie, il progressa prudemment vers Mazomeno où il subit une très forte embuscade. Le 15 mars, la garnison de Kongolo dut repousser une attaque rebelle et le 22 mars, l’armée populaire de libération claironna : « Les forces de l’ANC ont dû évacuer le poste de Kabambare, suite à une importante attaque de l’APL ». De retour à Kongolo, le 10e Bn commando réoccupa les anciens entrepôts de la Cotanga et chaque matin, au cours de la parade, Jean SCHRAMME haranguait ses hommes et leur expliquait le sens de leur combat. Le bon vieux temps des Forces Katangaises et des défaites infligées à l’ANC était fréquemment invoqué. Le charroi du bataillon Léopard fut renforcé par deux jeeps, une veille Minerva reconstituée à partir d’épaves abandonnées près du camp militaire et une Willys avec remorque ramenée d’E’ville par le lt DENUL sur lesquelles il fit installer des pieds de mitrailleuses. La Minerva, armée d’une mitrailleuse Astra et d’une mitrailleuse lourde de 12,7 mm protégée par un bouclier, lui fut réclamée par le major de HUCCORNE qui prétextait qu’elle lui appartenait car elle provenait du camp militaire. Tous les véhicules du major SCHRAMME portaient l’inscription « 10e codo » et l’emblème du léopard. François LATINIS, qui commandait la section d’armes lourdes, demanda à rejoindre la vie civile car il arrivait à la fin de son contrat. Il combattait depuis le mois d’août 1964 et avait été fort éprouvé par les combats. Il retourna à Elisabethville où il fut engagé dans le service pompier de la capitale du cuivre (il fut massacré par les sbires de MOBUTU en juillet 1967).

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